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 Vous êtes ici: Accueil >  Sommaire des numéros parus >  N° 93 septembre 2007

Ecrire au poivron

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        La laïcité, prétexte pour une gesticulation

        La farce de Maître Brard

        La Pravda municipale du 11 juillet avait titré "Un règlement intérieur laïc" pour rendre compte d’un vote du conseil municipal le 28 juin. Il s’agit en réalité d’une bien mauvaise farce jouée à la laïcité ce soir-là.

    Selon la Pravda, "le règlement intérieur interdisait, sous peine d’expulsion immédiate, les propos racistes et antisémites. Le texte a été modifié pour interdire également le port ostentatoire de signes religieux dans le cadre du respect de la loi sur la laïcité".

    Des contre-vérités

    Le règlement intérieur n’interdisait, et n’interdit toujours rien. Il donne seulement le pouvoir au maire d’expulser de la séance du conseil une personne tombant dans les catégories ci-dessus, il ne l’oblige pas. C’est le fait du prince. Il indique "le maire peut retirer la parole pour le reste de la séance à tout conseiller qui incite au racisme, à la violence, à la haine, à l’antisémitisme". La modification consiste à ajouter à la liste le port de "signes ostentatoires religieux".

    Les propos racistes et antisémites, tombent sous le coup de la loi. Leur mention dans le règlement n’ajoute rien aux poursuites judiciaires que le maire, en tant que responsable de l’ordre public lors du conseil, peut susciter. Il est surprenant d’ailleurs de mettre sur le même plan ces actes délictueux et le port de signes religieux , qui n’est de nulle façon un délit.

    Aucune loi n’interdit aux élu-e-s le port de signes religieux. Au point que ni le règlement intérieur du Sénat, ni celui de l’Assemblée nationale ne l’interdisent. Il n’y a aucun antécédent dans d’autres communes.

    Malagnoux et l’intolérance

    Pour justifier l’amendement, il s’attaque ... à la tolérance. "Sous prétexte de tolérance, on voit certains abuser de notre patience" (...) "La tolérance, cela n’a rien à voir avec la République. La tolérance c’est plutôt de la condescendance. Ce n’est pas l’esprit de la République". De plus, dit-il, nous n’avons pas à "subir de pression de la part de la puissance publique". Car, pour lui, "Si les élus sont des citoyens, ils sont aussi les représentants de l’État laïc". Et, "qu’un élu du peuple s’exhibe à ce moment (lors d’un conseil) cela fait partie de ces provocations qui ne servent que les intérêts des intégristes de tout poil".

    Brard et le pot aux roses

    "La proposition faite ce soir est que ce ne soit pas le maire qui décide seul, comme cela m’est arrivé de le faire". En effet, il y a quelques mois, le maire avait pris sur lui d’empêcher l’élue MNR de parler sous prétexte qu’elle portait une grande croix. S’en était suivi une heure de vociférations de l’élue et de débats inaudibles par les élus, qui votaient des choses dont ils n’entendaient pas la présentation. Bref, le cirque. Or, la liberté d’intervention d’un élu est un principe clairement affirmé par la loi. La jurisprudence comporte des annulations de conseils où cette liberté avait été insuffisamment respectée. A poursuivre dans ses sautes d’humeur, le maire prenait un risque juridique de voir annuler les délibérations d’un conseil.

    Responsable de la police lors du conseil, le maire peut interdire de parler et expulser : pas besoin du règlement intérieur. Mais porter un signe religieux, trouble-t-il l’ordre public ? Si une requête en annulation du conseil avait été déposée, le maire aurait dû argumenter sur le trouble à l’ordre public provoqué par une croix... Du Fernandel...

    Au final, beaucoup de bruit pour pas grand chose : une gesticulation pour protéger un maire qui ne contrôle pas toujours ses humeurs et prend souvent des aises avec la loi.

    Patrick Petitjean


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